Dès le Moyen Âge des momies égyptiennes parviennent en Europe et inutile de dire qu’elles fascinent. C’est le livre de Volney « Ruines ou Méditations sur les révolutions des empires (1791) » qui influence Talleyrand (ministre des Relations extérieures sous le Directoire) lequel incite Bonaparte à se lancer dans la campagne d’Égypte de 1798 à 1801. Les premières fouilles archéologiques commencent immédiatement dès l’arrivée de Napoléon sur le sol égyptien. L’intérêt pour les tombes des pharaons ne va faire que croître !
Un ouvrage publié par une Américaine en 1869 évoque la malédiction qu’engendrerait l’ouverture des tombes en Égypte. D’autres romanciers vont lui emboiter le pas. Ces histoires de malédictions sont-elles sorties tout droit de l’imagination des écrivains ou comportent-t-elle une part de réalité ?
Peu de temps avant la découverte du tombeau de Toutankhamon par le Britannique Howard Carter, son canari est retrouvé mort, dévoré par un cobra. Il est dans l’ancienne Égypte l’animal sacré des pharaons. Faut-il y voir un signe avant-coureur ?
Le 4 novembre 1922 Carter observe dans le sable de la Vallée des Rois en Égypte une dalle qui ferme l’entrée d’une sépulture royale. Enfin ses efforts vont être récompensés, lui qui depuis tant d’années recherche une tombe de pharaon encore inviolée. En mettant la main sur cette sépulture intacte, il va révéler au monde la prodigieuse richesse de l’Égypte pharaonique. Loyal, il envoie un télégramme à son mécène, Lord Carnarvon, et c’est en présence de celui-ci que, dix jours plus tard, le 16 novembre, il fait dégager l’escalier de pierre qui descend vers le tombeau.
Il écrit : « Les mains tremblantes, je pratiquai une petite ouverture dans le coin supérieur gauche […]. Puis je plaçai une bougie devant l’ouverture, pour m’assurer qu’il n’y avait pas d’émanations dangereuses, élargis le trou et regardai. […] À mesure que mes yeux s’accoutumaient à l’obscurité, des formes se dessinèrent lentement : d’étranges animaux, des statues, et, partout le scintillement de l’or. Pendant quelques secondes – qui durent sembler une éternité à mes compagnons – je restai muet de stupeur. Et, lorsque lord Carnarvon demanda : “Vous voyez quelque chose ?”, je ne pu que répondre : “Oui, des merveilles ! ».
Le 5 avril de la même année, Lord Carnavon meurt et au même moment une coupure d’électricité plonge la capitale d’Égypte dans le noir. Le soir du décès du mécène son chien se serait mis à hurler avant lui aussi de trépasser. La presse s’empare de ce décès mystérieux et évoque « la vengeance de la momie ». Un journaliste évoque un étrange texte écrit à l’entrée de la tombe : « Ceux qui pénètrent dans ce tombeau sacré seront touchés par les ailes de la mort ». Sauf qu’on n’a jamais trouvé de pareilles inscriptions ! Les fausses malédictions propagent la rumeur et ce qui suit ne va pas contribuer à la dégonfler. Un an après l’ouverture de la tombe, on compte déjà cinq morts dans l’équipe. Des poisons, un virus, des gaz mortels dégagés par les bandelettes de la momie en seraient en outre l’explication. Au total une trentaine de décès sont associés à la malédiction. Des hommes politiques américains vont même jusqu’à demander l’ouverture d’une enquête sur les momies exposées dans les musées. Présentent-elles le même danger que celle de Toutankhamon ?
En réalité le décès de chacune de ces personnes ne s’explique nullement par l’ouverture de la tombe. Il s’agit de morts « banales » : insolation, pneumonie, accident, vieillesse, piqûre de moustique qui s’est infectée (comme pour Lord Carnavon !), etc. Quant au « profanateur en chef » Howard Carter, il meurt dix-sept ans plus tard d’un lymphome (cancer du système lymphatique).
La légende sera entretenue avec Hergé comme en témoigne la première page des « 7 Boules de cristal » : « Ça finira mal cette histoire, vous verrez », dit un homme portant un chapeau. Et Tintin de répondre :
« Qu’est-ce qui finira mal ? »
« Eh bien, cette histoire de momies…Souvenez-vous de Tout-Ankh- Amon, jeune homme !… Songez à tous les égyptologues qui sont morts mystérieusement après avoir ouvert le tombeau de ce Pharaon…Vous verrez, la même chose arrivera à ceux qui ont violé la sépulture de cet Inca… »
On peut regretter que la science et des analyses rigoureuses aient anéanti ce mythe, si beau et vendeur pour les romanciers. Reste qu’il n’est pas interdit de se passionner pour les livres, BD et timbres dédiés aux mystérieuses pyramides. Ils convoquent l’imagination à défaut de malédiction.