Dessiné par Michel Ciry et gravé par Charles Mazelin d´après un portrait de Pierre Mignard Photo (C) RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Gérard Blot

Si on ne connait pas forcément bien sa vie, les personnages de Molière sont au moins aussi célèbres que son créateur. Ils désignent bien des caractères et comportements comme l’avarice avec Harpagon, l’hypocrisie (Tartuffe manipule la religion pour avoir tout ce qu’il veut), de faux savants et mauvais médecins (Trissotin et Diafoirus), la coquetterie (Célimène que l’on voit sur notre timbre) etc.

 

Dessiné par Robert Cami et gravé par René Cottet

Quant au jeune roi Louis XIV, il connait bien celui qui a mis en scène dans ses comédies toutes les classes sociales, tous les caractères et toutes les formes de langage, du plus précieux au plus populaire.
Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière, est né à Paris le 15 janvier 1622. Nous fêtons donc cette année le 400ème anniversaire de sa naissance. Son père est un riche tapissier qui travaille pour le roi. Ce n’est pas un métier qui intéresse le jeune Jean-Baptiste, lui qui partage la passion de son grand-père maternel pour le théâtre, un divertissement accessible uniquement aux classes aisées. Il fait de bonnes études et, avocat à dix-huit ans, se lie avec des comédiens avant de rencontrer Madeleine, sa future compagne, qui est déjà une actrice célèbre. C’est elle qui va contribuer à la formation théâtrale du futur Molière. Jean-Baptiste renonce au métier d’avocat et ne reprend pas la charge de tapissier du roi de son père. Sa vocation, son ambition, c’est d’être comédien. Le 30 juin 1643 il fonde à l’âge de vingt-et-un ans L’Illustre-Théâtre avec ses amis comédiens. Il prend la tête de la troupe et adopte en août 1644 le pseudonyme de Molière.
La concurrence est rude, le succès se fait attendre, la faillite survient deux ans plus tard. Molière part en prison à cause de ses dettes mais son père verse une caution afin qu’il soit libéré. Avec Madeleine, il quitte Paris et débutent des tournées dans toute la France. Il révèle ses dons de comédien mais aussi pour la direction d’acteurs. Il commence à écrire ses propres pièces, Molière connait enfin le succès populaire. A 36 ans, il regagne Paris pour révéler son talent, notamment auprès du jeune roi Louis XIV dont il devient le bouffon en quelque sorte. Il a le droit de tout dire et de tout jouer. Il triomphe en 1659 avec « Les Précieuses ridicules », une satire des prétentions intellectuelles de l’élite. Molière ne cesse ensuite d’écrire mais le succès lui vaut aussi des jalousies.
Il rompt avec Madeleine pour épouser Armande pour laquelle il écrira ses plus beaux rôles féminins. En 1664, Molière et le musicien Lully s’associent pour composer la comédie-ballet « Le Mariage forcé ». Ils collaboreront sept ans. Dans beaucoup de ces chefs-d’œuvre, derrière le rire, se trouve une dénonciation des rigidités de la société. Il le fait avec talent, avec la vitalité de la langue française. Et c’est ainsi qu’elle est qualifiée aujourd’hui encore de « langue de Molière ».
Le 17 février 1673 le comédien manifeste de violentes douleurs à la poitrine. Il insiste néanmoins auprès d’Armande pour jouer dans l’après-midi la quatrième représentation du « Malade Imaginaire » dans son théâtre du Palais-Royal : « Comment voulez-vous que je fasse ? Il y a cinquante pauvres ouvriers qui n’ont que leur journée pour vivre. Que feront-ils si l’on ne joue pas ? Je me reprocherais d’avoir négligé de leur donner du pain un seul jour, le pouvant faire absolument. »

Il s’écroule à la toute fin de la représentation. On le transporte aussitôt à son domicile mais il meurt quelques heures plus tard. Il a seulement 51 ans mais cet homme génial était usé par le travail d’acteur comme d’écrivain. Il a donné pas moins de 2500 représentations en moins de quinze ans. Le surlendemain, à la tombée de la nuit, la dépouille du comédien est inhumée au cimetière Saint-Joseph, près de l’église Saint-Eustache à Paris. Près de huit cents personnes de toutes conditions sociales l’accompagnent à sa dernière demeure. Parmi ses amis se trouve La Fontaine dont nous avons parlé en décembre dernier.

Dessiné et gravé par Jacques Derrey

Armande va tout faire pour préserver la mémoire de Molière. Elle contribue à la fusion des deux dernières troupes parisiennes, la troupe de Molière ou troupe de l’hôtel Guénégaud, et la troupe de l’hôtel de Bourgogne. L’ordonnance royale du 21 octobre 1680 les réunira sous le nom de Comédie-Française et celle-ci se fera un devoir d’entretenir jusqu’à nos jours le répertoire classique et notamment les œuvres de Molière.

Dessiné et gravé par Marie-Noëlle Goffin

Voici un rappel de quelques pièces les plus connues :
Les Précieuses ridicules (1659)/L’École des femmes (1662)/Le Misanthrope (1666)/Le Médecin malgré lui (1666)/L’Avare (1668)/Le Tartuffe ou l’Imposteur (1669)/Les Fourberies de Scapin (1670)/Le Bourgeois gentilhomme (1670)/Les Femmes savantes (1672)/Le Malade imaginaire (1673)